Ce que rembourse la Sécurité sociale : principes de base

Le remboursement par l’Assurance Maladie se fait sur la base d’un tarif appelé tarif de convention. Ce montant, fixé par l’État, est censé représenter un "prix juste" pour chaque acte ou prestation. Mais il ne correspond souvent pas au prix réellement payé.

  • Base de remboursement : le montant estimé par l’Assurance Maladie pour un soin précis (par exemple, 25 € pour une consultation chez un médecin généraliste du secteur 1).
  • Taux de remboursement : le pourcentage de cette base pris en charge (ex : 70 % pour une consultation).
  • Ticket modérateur : la partie qui reste à votre charge après application du remboursement.

À noter : d’autres frais non remboursés existent aussi, par exemple la participation forfaitaire (1 € par consultation médicale) ou la franchise médicale (plafonnée sur l’année).

Des plafonds qui varient selon les soins

Les montants et les taux de remboursement diffèrent selon la nature du soin. Quelques exemples pour illustrer (chiffres actualisés en 2023, source ameli.fr).

  • Médecine de ville :
    • Médecin généraliste secteur 1 : consultation à 25 €, remboursée à 70 % = 16,50 € versés par la Sécu (après déduction de la franchise de 1 €).
    • Médecin secteur 2 (honoraires libres) : même base, mais dépassements à la charge du patient, non remboursés.
  • Médicaments :
    • Médicaments à vignette blanche : 65 % de la base remboursée, base variable selon le médicament.
    • Médicaments à service médical rendu modéré : 30 % seulement.
    • Certains médicaments (vignette orange) : 15 %, voire 0 % si le service est jugé insuffisant.
  • Soins dentaires :
    • Détartrage : base de 28,92 €, remboursée à 70 % = 20,24 €.
    • Couronne céramique : base de 120 €, prise en charge à 70 % = 84 €, alors que le prix moyen en cabinet dépasse souvent 450-600 €.
  • Optique (lunettes) :
    • Monture + verres : base définie par décret, souvent entre 2,84 € et 24,54 € par verre selon la correction, remboursée à 60 %, soit… quelques euros.
  • Hospitalisation :
    • Frais de séjour : remboursés à 80 % pendant l’hospitalisation (100 % pour maternité ou mesures particulières).
    • Forfait journalier hospitalier : 20 € par jour, 15 € en psychiatrie, jamais remboursé sans complémentaire.
    • Dépassements d’honoraires fréquents, surtout en clinique privée.
  • Actes paramédicaux :
    • Exemple : kinésithérapie, acte remboursé entre 60 % et 70 % sur la base (souvent bien inférieure au coût réel d’une séance).

Les postes où la Sécurité sociale rembourse le moins

Certains domaines sont notoirement mal couverts :

  • Prothèses dentaires et implants : la base de remboursement est très éloignée du tarif réel. Par exemple, une prothèse amovible à 400 € pourra n’être remboursée qu’à hauteur de 70 % de 100 € (soit 70 €), le reste étant à la charge du patient, sauf contrat responsable (100 % Santé).
  • Optique : lunettes et lentilles sont principalement remboursées sur une base dérisoire, quelle que soit la correction. Les appareils auditifs étaient peu couverts, mais le 100 % Santé est venu corriger le tir depuis 2021 (voir plus loin).
  • Soins non conventionnés: soins pratiqués par un médecin en secteur 3, spécialistes non conventionnés, thérapeutiques non reconnues, etc. : dans certains cas, la Sécu ne remboursera rien du tout.
  • Actes hors nomenclature : certains actes récents, ou esthétiques, n’entrent pas dans la grille de remboursement (ex : chirurgie plastique, ostéopathie…).

Le fameux reste à charge : de quoi parle-t-on concrètement ?

Le "reste à charge" désigne la somme qui n’est ni remboursée par la Sécurité sociale, ni par la complémentaire santé (si elle existe). Plusieurs éléments expliquent ce reste à charge :

  1. Le ticket modérateur : c’est la part des dépenses de santé non remboursée par la Sécu (hors participation forfaitaire et franchises).
  2. Les dépassements d’honoraires : pratiqués librement par certains médecins, en particulier les spécialistes secteur 2 ou secteur 3, et non pris en charge par la Sécu.
  3. Les actes non remboursés : par exemple, certaines séances de psychomotricité, ostéopathie, etc.
  4. Forfaits fixes : comme le forfait journalier à l’hôpital, ou la participation de 1 € par consultation.

À titre d’exemple, d’après la DREES (2023), le reste à charge moyen pour un assuré français (après remboursement Sécu ET complémentaire) est de près de 214 € par an, mais ce chiffre grimpe dans certains cas (hospitalisations longues, pathologies lourdes, équipement optique, etc.).

Exemples concrets pour mieux voir les limites

Voici quelques cas typiques pour illustrer comment les plafonds de la Sécurité sociale se traduisent en pratique :

  • Jean, 37 ans, consulte un rhumatologue secteur 2 :
    • Prix de la consultation : 60 €
    • Base de remboursement Sécu : 30 €
    • Remboursement à 70 % : 21 €, moins la franchise de 1 € = 20 €
    • Dépassement d’honoraires : 30 €, non remboursé par la Sécu
    • Reste à charge avant mutuelle : 39 €
  • Claire, 52 ans, besoin de lunettes :
    • Monture + 2 verres : tarif opticien : 250 €
    • Base Sécu : < 40 €
    • Remboursement à 60 % : environ 24 €
    • Reste à charge : plus de 90 % du coût… sauf si Claire bénéficie du forfait optique de sa mutuelle ou du dispositif 100 % Santé (offre limitée en choix).
  • Yann, hospitalisé 5 jours :
    • Coût du séjour : 2 000 €
    • Remboursement Sécu : 80 % (hors actes et honoraires spécifiques ou chambre individuelle)
    • Forfait journalier : 5 x 20 € = 100 €, non pris en charge par la Sécu
    • Dépassements et prestations annexes (télé, chambre seule) : non remboursés non plus.

Les cas particuliers : « 100 % Santé », Affection Longue Durée et ALD

Grâce à la réforme 100 % Santé (mise en place entre 2019 et 2021), certaines prothèses dentaires, lunettes et aides auditives sont désormais intégralement remboursées… à condition de choisir dans les gammes du « panier 100 % ». Ce dispositif ne couvre pas l’ensemble des équipements disponibles sur le marché (ex : monture de marques, lunettes très spécifiques).

Pour les patients reconnus en Affection Longue Durée (ALD), les soins directement liés à cette pathologie sont remboursés à 100 % sur la base de la Sécurité sociale, mais :

  • Les dépassements d’honoraires ou actes hors « parcours de soins » restent à la charge du patient.
  • Les autres soins non liés à l’ALD gardent un remboursement classique.

Pourquoi ces limites ? Un enjeu d’équilibre… mais des conséquences concrètes

L’Assurance Maladie a été conçue dans une logique de solidarité, mais aussi de prudence budgétaire. Limiter le remboursement à des plafonds fixes permet de maîtriser les dépenses publiques, de responsabiliser le patient et d’inciter à ne pas surconsommer les soins. Ce choix politique se traduit cependant par de nombreux « trous dans la raquette » : sans complémentaire, il peut devenir difficile d’accéder à certains soins, voire de différer des traitements pourtant nécessaires.

Aujourd’hui, selon la DREES, près de 96% des Français disposent d'une complémentaire santé (mutuelle ou assurance), pour compenser ces limites. Mais certains publics sont encore exposés à un risque financier, faute de protection suffisante ou par méconnaissance des plafonds appliqués par la Sécu.

Pour aller plus loin : outils pratiques et liens utiles

  • Simulateur Ameli : permet d’estimer le remboursement pour un soin précis (ameli.fr).
  • Droits et aides selon situation : pour les plus modestes, la Complémentaire Santé Solidaire (C2S) permet de supprimer certains restes à charge (renseignements sur ameli.fr ou solidarites-sante.gouv.fr).
  • Tableaux officiels de remboursement : à consulter sur service-public.fr et dans les guides annuels de la DREES.

Maîtriser les montants réellement couverts par la Sécurité sociale, c’est le premier pas pour anticiper ses dépenses de santé, demander l’accompagnement adéquat, et éviter les mauvaises surprises. Que ce soit pour soi, un enfant ou un parent âgé, adopter cette vigilance permet de préserver son budget… et sa tranquillité d’esprit.